PROTECT30 - Que faire si l’un des partenaires de la construction ne présente pas l’attestation d’assurance obligatoire en vertu de la loi Peeters-Borsus ?

 

Comme chacun le sait désormais, les partenaires de la construction soumis à l’obligation d’assurance sont tenus de présenter une attestation d’assurance au plus tard au démarrage de leurs travaux respectifs. Ce document démontre que leur responsabilité décennale est couverte conformément à la loi Peeters-Borsus en vigueur dans le secteur du logement.

Sur ce plan justement, une tâche administrative supplémentaire est imposée à l’architecte par le législateur. L’article 12, §1, 2° de la loi stipule en effet que l’attestation doit être remise à l’architecte « qui la réclame le cas échéant ».

En d’autres termes, l’architecte est chargé par le législateur de vérifier que les partenaires de la construction concernés sont en ordre d’assurance, en veillant à ce que les attestations requises soient bien délivrées.

Un exercice qui peut parfois se révéler délicat. Certains entrepreneurs ne sont pas au courant de cette obligation, ou du moins prétendent ne pas l’être. D’autres avancent qu’ils ne sont pas concernés par l’obligation d’assurance, ou exigent pour la souscription d’une telle police une intervention supplémentaire du maître d’ouvrage, ce qui n’est pas toujours pour plaire à ce dernier.

L’architecte se retrouve alors dans une position difficile, et beaucoup de nos assurés déplorent le temps et l’énergie qu’ils gaspillent à réclamer ces attestations, souvent en vain.

 

L’obligation de l’architecte et les possibilités du maître d’ouvrage

La loi oblige l’entrepreneur à assurer sa responsabilité décennale et à transmettre l’attestation d’assurance au client et à l’architecte au plus tard au début des travaux.

L’architecte, à son tour, est légalement tenu de vérifier si les partenaires de la construction qui sont obligés de souscrire une assurance ont souscrit l’assurance et d’exiger l’attestation si elle n’est pas présentée. Si l’entrepreneur ne vous fournit pas l’attestation, vous devez donc le déclarer en défaut et exiger l’attestation, idéalement avec le client en copie.

Toutefois, l’architecte ne peut pas interdire à l’entrepreneur de commencer ou de poursuivre les travaux si l’attestation n’a pas été délivrée. L’architecte n’est en effet pas sous contrat avec l’entrepreneur.

Le maître d’ouvrage, par contre, entretient bien une relation contractuelle avec l’entrepreneur et dispose dès lors de la capacité juridique pour obliger ce dernier à souscrire une assurance et interdire le lancement ou la poursuite des travaux tant qu’une attestation d’assurance n’aura pas été remise.

 

Que peut faire l’architecte ?

Retenez tout d’abord que l’architecte doit pouvoir prouver qu’il a rempli son devoir de contrôle. La première chose qu’il doit faire consiste donc à demander par écrit à l’entrepreneur concerné de remettre son attestation.

Si l’attestation ne vous est pas remise après une ou plusieurs demandes écrites, nous vous conseillons d’en avertir le maître d’ouvrage, toujours par écrit. Vous montrez ainsi à votre partie co-contractante – le maître d’ouvrage – que vous avez rempli votre devoir de contrôle, et répondez par la même occasion à votre devoir d’information. En définitive, c’est bien le maître d’ouvrage qui a tout intérêt à ce que ses partenaires de la construction soient assurés pour les dommages qu’ils pourraient lui causer. Il est en outre la seule personne ayant la possibilité de contraindre les entrepreneurs à honorer leur obligation d’assurance.

Vous pouvez vous baser sur le texte suivant pour la rédaction de votre missive :

« Madame, Monsieur,

 

Je constate que l’entrepreneur X a entamé/compte entamer ses travaux dans le cadre de votre projet sans avoir remis – en dépit de mes demandes explicites et répétées en la matière – l’attestation d’assurance requise en vertu de la loi du 31 mai 2017, document visant à prouver que sa responsabilité décennale est assurée.

 

Comme vous le savez, la loi du 31 mai 2017 impose à tout entrepreneur de remettre une attestation d’assurance avant le démarrage des travaux, laquelle vient démontrer que sa responsabilité décennale est couverte pour les dix années complètes à compter de la réception.

 

Cette même loi m’oblige, en ma qualité d’architecte, à réclamer cette attestation d’assurance le cas échéant. J’ai donc sollicité l’entrepreneur dont question à plusieurs reprises (voir mes courriers du ...), sans que ce dernier n’ait donné suite à mes demandes. En tant qu’architecte, je ne suis pas habilité à faire suspendre les travaux tant que l’attestation n’aura pas été remise. Seul le donneur d’ordre, c’est-à-dire vous-même, peut prendre des mesures à l’encontre de l’entrepreneur en défaut.

 

Je me permets donc d’insister vivement pour que vous fassiez suspendre ou interdire les travaux de l’entrepreneur tant que ce dernier ne vous aura pas remis son attestation. L’absence de cette attestation – et donc le manque d’assurance – peut entraîner des conséquences défavorables pour lesquelles ma responsabilité d’architecte ne saurait être engagée. Si ma demande reste vaine, je me verrai également contraint de vous imputer tous les préjudices éventuellement subis.

 

Ce courrier vous est adressé sous réserve de tous droits et sans reconnaissance préjudiciable.

 

Salutations distinguées, »

 

Nous comprenons qu’il n’est pas toujours évident d’envoyer un courrier formulé de la sorte au maître d’ouvrage. Il s’agit toutefois d’un sujet extrêmement sensible, et il est important que vous vous protégiez au mieux en tant qu’architecte.

Idéalement, vous enverrez cette lettre par courrier recommandé. Un e-mail peut également suffire s’il est possible de démontrer que le maître d’ouvrage l’a bien reçu (par exemple s’il y répond).

La proposition susmentionnée peut être utilisée pour les clients privés. Dans tous les cas, nous vous conseillons de contacter le service d’études de Protect pour obtenir des conseils en cas de situations ou de problèmes spécifiques.

 

Conseils et réflexions

Pour conclure, vous trouverez ci-dessous quelques conseils et réflexions à propos de l’exercice de votre devoir de contrôle relatif aux attestations :

  1. Via le portail My Protect (MyProtect - https://login.protect.be/FR/), vous avez la possibilité d’envoyer aux entrepreneurs un e-mail reprenant toutes les informations dont l’entrepreneur a besoin pour demander une attestation à son assureur.

    Vous évitez ainsi une correspondance excessive pour obtenir des informations complémentaires, et empêchez les mauvais élèves de prétendre qu’ils ne disposent pas des informations requises pour demander leur attestation.

  2. Prévoyez dans les dispositions administratives de votre cahier des charges que l’entrepreneur est tenu de respecter l’obligation d’assurance légale et de fournir en temps utile l’attestation d’assurance requise. Il peut être conseillé au maître d’ouvrage d’ajouter une disposition similaire au contrat d’entreprise.

    Vous évitez ainsi les discussions une fois le contrat d’entreprise signé, par exemple lorsque l’entrepreneur réclame une somme supplémentaire que le maître d’ouvrage refuse de payer. Il s’agit d’une obligation légale de la part de l’entrepreneur, dont le respect ne peut pas être simplement subordonné au paiement par le maître d’ouvrage.

  3. L’ingénieur en stabilité doit lui aussi remettre une attestation d’assurance avant l’entame des travaux faisant l’objet de son étude.

L’ingénieur aura lui aussi besoin de divers renseignements pour obtenir cette attestation. Vous pouvez lui transmettre ces données via notre portail My Protect (MyProtect - https://login.protect.be/FR/). S’il est lui-même assuré chez nous, vous pouvez par ailleurs lui envoyer un lien permettant d’obtenir l’attestation plus rapidement.

Si l’ingénieur en stabilité est l’un de vous sous-traitant, il est couvert par votre propre assurance de responsabilité décennale.

 

Synthèse

Le législateur a imposé une tâche administrative supplémentaire à l’architecte. L’architecte doit vérifier si les partenaires de la construction soumis à l’obligation d’assurance ont bien souscrit l’assurance obligatoire en vertu de la loi Peeters-Borsus.

L’architecte ne dispose toutefois d’aucun recours juridique pour forcer les partenaires de construction récalcitrants à se conformer à la loi.

Il est donc très important qu’il puisse prouver avoir rempli son devoir de contrôle, d’une part, et qu’il informe correctement le maître d’ouvrage, d’autre part. Une correspondance écrite est impérative à ce niveau.

L’architecte doit informer le maître d’ouvrage de la remise ou non des attestations, afin que ce dernier puisse prendre les mesures nécessaires.

Au bout du compte en effet, l’obligation d’assurance protège le maître d’ouvrage.

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